Avenir du travail
Une ressource sélectionnée de recherches récentes sur les tendances qui façonnent le marché du travail au Canada.
Cette étude souligne une avancée méthodologique dans l’analyse des politiques commerciales en démontrant que les techniques modernes d’apprentissage machine peuvent compléter les modèles économiques traditionnels afin d’éclairer les effets complexes des politiques.
À partir de données canadiennes de 1997 à 2022, les chercheur·ses ont recouru à trois algorithmes d’ensemble réputés pour la fiabilité de leurs prédictions, dans le but d’examiner l’impact des variations tarifaires sur les importations de marchandises (en valeur mensuelle, USD).
Cette nouvelle approche vise à dépasser les limites des modèles économétriques classiques, qui supposent des relations linéaires simples, alors que les flux commerciaux réels sont influencés par des interactions complexes : fluctuations monétaires, frictions dans les chaînes d’approvisionnement mondiales, changements de politiques.
Les chercheur·ses ont pris en compte ces complexités à l’aide de trois approches d’apprentissage machine :
- Arbres de décision par gradient boosting, utilisés pour corriger les erreurs de prédiction
- Gradient boosting stochastique, qui procède à des sous-échantillonnages aléatoires afin d’éviter que les modèles n’ignorent de nouvelles données
- Forêts aléatoires, qui consistent à agréger les prédictions issues de plusieurs arbres de décision
L’étude s’appuie également sur une innovation méthodologique clé : les Shapley Additive Explanations (SHAP). Cette méthode permet de rendre les résultats des modèles plus interprétables. Alors que les modèles d’IA sont souvent critiqués comme des « boîtes noires » fournissant des prédictions sans explication, SHAP attribue à chaque facteur sa contribution dans la prédiction. Les responsables des politiques peuvent ainsi comprendre non seulement ce que le modèle prédit, mais aussi pourquoi il le prédit, et mesurer l’effet marginal de chaque variable explicative. Cette transparence accrue renforce la responsabilité et la crédibilité des analyses.
Les modèles élaborés par les chercheur·ses sur l’élasticité tarifaire illustrent la valeur de cette transparence. Dans les trois cas, le rapport montre que les exportations constituent le principal prédicteur du volume des importations (avec plus de 70 % du pouvoir explicatif), suivies par les tarifs (environ 22 %) et par les taux de change (moins de 5 %). Les estimations d’élasticité tarifaire indiquent qu’une hausse de 1 % des droits de douane correspond à une diminution des importations de 0,18 à 0,23 %. Cet effet est plus faible que celui calculé dans les modèles traditionnels, mais demeure économiquement significatif, compte tenu du faible niveau moyen des tarifs au Canada.
L’analyse par arbres de décision a mis en évidence des effets que les modèles linéaires ne capteraient pas. Elle montre notamment que de petits ajustements tarifaires peuvent avoir des effets disproportionnés lorsqu’ils franchissent certains seuils (autour de 0,34 % en termes logarithmiques). Ces résultats offrent une information précieuse pour les négociations commerciales et l’élaboration des politiques publiques.
Cette étude met en évidence la valeur que certains modèles d’IA peuvent offrir aux gouvernements, aux consultant·es et aux entreprises privées qui cherchent à mieux comprendre les répercussions des ajustements tarifaires sur les industries canadiennes. Elle précise également que l’approche méthodologique adoptée fournit un cadre reproductible d’aide à la décision fondée sur des données probantes, applicable à d’autres domaines de politique publique, notamment le marché du travail et l’environnement.