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De quelles compétences ai-je besoin? Faire bénéficier les Canadiens du système O*NET des États-Unis

Rapport de perspectives de l’IMT n° 31

Mai 2020

Accueil > Perspectives de l’IMT > Rapport de perspectives de…

Table des matières

Principaux constats

  • La base de données étatsunienne O*NET représente l’un des répertoires publics les plus importants, les plus complets et les plus utilisés au monde pour documenter les caractéristiques détaillées des emplois/travailleurs. Il comprend, entre autres, des mesures de l’importance et de la complexité de 35 compétences dans 968 professions.
  • Afin de tirer parti de l’information de O*NET comme les cotes des compétences dans le contexte canadien, Emploi et Développement social Canada et Statistique Canada collaborent à la conception d’une table de correspondance rigoureuse et à plusieurs niveaux entre les systèmes de classification des professions étatsunien et canadien.
  • Avec cette table de correspondance, les professions des États-Unis répertoriées dans O*NET peuvent être mises en correspondance avec les professions canadiennes et les connaissances empiriques provenant des compétences (ainsi que d’autres caractéristiques des emplois/travailleurs) qui y sont associées. Par exemple, on pourrait calculer le pourcentage de postes vacants pour lesquels un certain niveau de compétence est associé, la part des travailleurs dans des professions pour lesquelles une compétence est cotée comme « très importante » ou le niveau de compétence moyen pour les professions qui connaissent la plus forte croissance, pour ne citer que ces quelques possibilités. Dans le contexte de la COVID-19, le système O*NET a également été utilisé pour obtenir des informations sur les professions qui exigent que le travailleur effectue des tâches professionnelles à proximité physique d’autres personnes.
  • Lorsqu’on présente les indicateurs possibles qui peuvent être développés grâce à O*NET, il est important d’être transparent sur les limites des données et la façon dont elles sont construites. Ces limites comprennent, par exemple : 1) la difficulté d’interpréter les cotes des compétences du système états-unien; 2) la mise à jour des données qui n’est faite que pour un petit ensemble de professions chaque année (celles qui sont considérées comme recherchées); 3) le fait que les cotes représentent des moyennes qui peuvent ne pas rendre compte des différences de compétences entre les secteurs d’activité ou les régions.
  • En transposant les données O*NET dans le contexte canadien, nous pourrons tirer parti de données existantes d’une manière efficace et rentable. De plus, la transparence au sujet des limites des données O*NET permettra de guider les utilisateurs sur la façon dont les informations doivent être utilisées et interprétées. Cet exercice contribuerait aussi à orienter la mise au point d’un futur système canadien, en soulignant les améliorations potentielles à apporter, y compris le développement d’autres approches qui permettraient d’optimiser ces données ainsi que d’autres sources disponibles d’informations sur les compétences. Par exemple, le moissonnage du web est actuellement à l’étude en tant qu’outil permettant d’augmenter les données sur les compétences associées aux professions.

Introduction

Dans le Rapport de perspectives de l’IMT no 16, Emploi et Développement social Canada (EDSC), Statistique Canada (StatCan) et le Conseil de l’information sur le marché du travail (CIMT) ont conjointement noté qu’un lien statistiquement fiable entre la Taxonomie des compétences et des capacités d’EDSC et la Classification nationale des professions (CNP) permettrait de mieux articuler la composition et la répartition des compétences entre les emplois. Cette information est nécessaire pour faciliter la définition et la mesure des compétences dans le contexte d’un monde du travail en évolution rapide.

En conséquence, les trois organisations se  sont associées pour explorer, définir et évaluer différentes méthodes permettant de lier les caractéristiques des emplois/travailleurs, en mettant l’accent sur l’établissement d’une correspondance cohérente entre les compétences exigées et les professions. Nous avons cerné plusieurs méthodes potentielles, allant du recours à des experts des professions à l’utilisation de techniques automatisées combinant des algorithmes d’apprentissage statistique et le traitement du langage naturel.

Dans ce rapport conjoint, nous examinons l’un des cadres de travail les plus largement utilisés pour relier les caractéristiques des emplois et des travailleurs aux professions : l’Occupational Information Network (O*NET) des États-Unis. Le système O*NET s’appuie sur des experts des professions pour établir des liens entre les professions et l’importance et le niveau (c’est-à- dire la maîtrise ou l’expertise) des compétences. Nous explorons également les possibilités d’appliquer ces cotes d’importance et de niveau des compétences du système O*NET aux professions canadiennes, telles que définies dans la Classification nationale des professions (CNP), afin de créer des profils et des perspectives analytiques sur les compétences recherchées sur le marché du travail canadien.

O*NET en un coup d’œil

O*NET est une base de données en ligne qui offre de l’information standardisée sur les caractéristiques des emplois et des travailleurs aux États-Unis. Créé à l’origine en guise de mise à jour du Dictionnaire des titres d’occupation (DOT), désormais remplacé, le système a pour fonction principale d’aider les particuliers à prendre des décisions en matière de carrière et d’éducation, et de fournir des outils pour constituer et maintenir une main-d’œuvre mondialement compétitive (National Research Council, 2010). Utilisé par les chercheurs, les décideurs politiques, les professionnels en développement de la main- d’œuvre et en ressources humaines, les chercheurs d’emploi, les étudiants et d’autres personnes partout dans le monde à des fins diverses, il peut aider à estimer les expositions professionnelles liées à la santé et à la sécurité, à donner un aperçu des déficits de compétences et à définir les voies de transition professionnelle pour les travailleurs affectés par les transformations du marché du travail.

 

Encadré 1 : Méthodologie de cotation de l’importance et du niveau des compétences

Pour associer les compétences aux professions des États-Unis, O*NET s’appuie sur 16 analystes des professions spécialisés qui interprètent les données des professions et déterminent l’importance et le niveau de chaque compétence de la taxonomie O*NET. Ils suivent des procédures standardisées qui guident l’examen des informations détaillées sur les professions (appelées matériel de mise en situation), comme le titre et la définition de la profession, le niveau de préparation professionnelle nécessaire et les cotes d’importance moyennes des tâches principales et secondaires.

Les analystes des professions procèdent ensuite à la cotation des compétences par importance et par niveau. La cote d’importance est déterminée par l’examen du titre et de la définition de la profession ainsi que d’autres informations du système O*NET à propos des tâches, du domaine de compétences, des activités professionnelles et du contexte de travail de la profession. Les cotes d’importance pour ces autres catégories de descripteurs d’emploi sont, quant à elles, le résultat de sondages remplis par les titulaires d’emplois dans la profession en question.

Les cotes de niveau des professions sont déterminées en comparant les tâches importantes associées à l’emploi et l’énoncé d’ancrage fourni pour la tâche en question (voir la figure 2). Cette cotation de niveau initiale est ensuite révisée lorsque l’analyste des professions compare l’énoncé d’ancrage avec les cotations du domaine de compétences, des activités professionnelles  et du contexte de travail, ici aussi déterminées en interrogeant les personnes travaillant dans ces professions.

Portée du système O*NET

O*NET est composé de deux éléments principaux. Premièrement, un modèle de contenu constitue le fondement organisationnel ou structurel de la base de données. Cette taxonomie hiérarchique de descripteurs professionnels est répartie en six grands domaines : 1) les caractéristiques des travailleurs, 2) les exigences pour les travailleurs 3) l’expérience requise 4) les exigences professionnelles, 5) l’information spécifique à une profession et 6) les caractéristiques de la main- d’œuvre. Chaque grand domaine est ensuite divisé en domaines précis dans lesquels se trouvent des ensembles de descripteurs. Deuxièmement, la base de données électronique elle-même est composée de données réelles. Elles comprennent différentes mesures associées à certains descripteurs, comme des cotes d’importance, de niveau et de pertinence, ainsi que d’autres données comme les salaires médians et les prévisions de croissance de l’emploi. Le centre de ressources O*NET propose aussi une série d’outils pour faciliter l’utilisation de la base de données.

Domaines de compétences

Le modèle de contenu O*NET classe les compétences en deux catégories mutuellement exclusives, soit les compétences de base et les compétences transversales, toutes deux organisées sous le grand domaine des exigences pour les travailleurs (voir la figure 1). Les 35 descripteurs de compétences (voir le tableau 1) ont été définis à l’origine par l’équipe de développement du prototype O*NET1. Ces 35 descripteurs sont regroupés en sept sous-catégories mutuellement exclusives : 1) compétences en matière de contenu, 2) compétences en matière de processus, 3) compétences sociales, 4) compétences en résolution de problèmes complexes, 5) compétences techniques, 6) compétences en matière de systèmes et 7) compétences en gestion de ressources (voir la figure 1).

Figure 1 : Exigences pour les travailleurs, compétences et descripteurs connexes

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Tableau 1 : Les 35 descripteurs de compétences O*NET regroupés en 7 sous-catégories

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Remarque : Les compétences contenues dans le domaine des compétences de la Taxonomie des compétences et des capacités d’EDSC sont surlignées en bleu. Il est à noter que «programmation» sera incluse dans la prochaine version de la taxonomie (ou intégrée dans le descripteur numérique).

Pour chacune des 968 professions pour lesquelles des données O*NET existent2, les 35 compétences sont cotées en fonction de leur importance  et leur niveau par des analystes des professions formés (voir l’encadré 1). Les cotes d’importance se voient attribuer des valeurs de 1 à 5, où 1 signifie que la compétence n’est pas  importante  pour cette profession et 5, qu’elle est extrêmement importante. Si la cote d’importance est de 2 ou plus, une cote de niveau de compétence (de 1 à 7) est déterminée sur la base d’une échelle d’ancrage (voir la figure 2). La cote de niveau de compétence mesure le degré de complexité auquel la compétence doit être exécutée dans la profession. Les cotes d’importance et de niveau sont standardisées à une valeur de 0 à 100 afin que ces scores soient cohérents et compréhensibles pour les utilisateurs3.

Ainsi, pour chacune des 968 professions de  O*NET, il existe 35 compétences avec des cotes d’importance et de niveau. À titre indicatif, le profil de compétences O*NET pour les gestionnaires de ressources humaines est présenté à l’annexe A.

Figure 2 : Niveau d’ancrage pour la compétence « compréhension de lecture »

1 2 3 4 5 6 7
Lire des instructions par étapes pour remplir un formulaire. Lire un communiqué de la direction décrivant de nouvelles politiques pour le personnel. Lire un article scientifique décrivant des procédures chirurgicales.

Tirer parti de O*NET pour mieux comprendre les compétences canadiennes

Étant donné la richesse des informations sur les compétences par profession disponibles  dans la base de données étatsunienne O*NET, il est important d’explorer comment nous pourrions en tirer des enseignements sur les caractéristiques des emplois et des travailleurs au Canada. Il y a deux considérations à prendre en compte.

Premièrement, la base de données O*NET classe les professions d’une autre manière qu’au Canada (voir l’annexe B). L’utilisation de O*NET dans le contexte canadien demande donc une « traduction » ou la mise en correspondance des codes de professions des États-Unis et de ceux du Canada, par le biais d’une table de correspondance (voir l’encadré 2). En pratique, cela implique de gérer jusqu’à quatre systèmes de codage différents, ce qui rend difficile le processus de mise en correspondance des professions canadiennes avec les titres de O*NET. Plus précisément, les professions d’une classification peuvent être plus ou moins granulaires que celle d’une autre, ce qui peut mener à une perte d’information.

Deuxièmement, sur les 35 descripteurs de compétences de O*NET, 32 sont intégrés dans les 47 descripteurs du domaine des compétences de la Taxonomie des compétences et capacités d’EDSC (voir le tableau 1), ce qui laisse 15 compétences pour lesquelles il n’y a pas de cotes O*NET.  Par conséquent, O*NET en soi  est insuffisant comme source de données. Des méthodes supplémentaires sont donc nécessaires pour compléter les profils de compétences des professions au Canada.

Encadré 2 : En chantier : création d’une passerelle entre les États-Unis (SOC) et le Canada (CNP)

Au Canada, diverses organisations gouvernementales et non gouvernementales, comme RBC, le Brookfield Institute for Innovation + Entrepreneurship et le ministère de l’Éducation supérieure et de la Formation professionnelle de la Colombie-Britannique ont bâti des concordances entre les classifications des professions des États-Unis et du Canada afin d’évaluer les compétences et les capacités dans différents segments du marché du travail canadien.

Toutefois, les concordances existantes n’ont pas la granularité nécessaire pour créer des descriptions précises et détaillées des professions. Le problème réside principalement dans le fait que la plupart des professions n’ont pas de correspondance claire et unique entre la Classification nationale des professions (CNP) du Canada et la Standard Occupational Classification (SOC) des États-Unis. Par exemple, le système étatsunien contient trois professions, soit mathématicien (15- 2021), statisticien (15-2041) et actuaire (15-2011), pour lesquelles il existe un seul groupe de professions dans la CNP (soit 2161). En l’absence d’une table de correspondance plus détaillée, tout profil O*NET de ce type risque d’être incorrectement combiné en un ou plusieurs profils CNP.

Table de correspondance entre O*NET et les professions canadiennes

Des travaux préliminaires ont commencé pour lier les professions canadiennes détaillées à celle de O*NET. Dans certains cas, une profession canadienne pourrait être associée avec plusieurs professions O*NET, ou vice versa. Ces correspondances multivoques soulèvent des complications quant aux façons d’appliquer les cotes de compétences O*NET aux professions canadiennes. Un prochain Rapport de perspectives de l’IMT sera consacré à ce sujet. Bien sûr, ce problème ne concerne pas les correspondances univoques, soit lorsqu’une profession canadienne n’est associée qu’à une seule profession O*NET, comme le montre le tableau 2.

Actuellement, 149 professions canadiennes peuvent être mises en correspondance directe entre les codes CNP à 4 et à 5 chiffres, puis entre les codes CNP à 5 chiffres et les codes O*NET- SOC à 8 chiffres. L’une d’entre elles (« Membres des corps législatifs ») n’est associée à aucune cote de compétence dans O*NET, elle est donc éliminée4. Le fait de travailler au niveau des codes CNP à 4 chiffres pour les 148 autres professions nous permet de faire des observations empiriques, puisqu’il s’agit du niveau le plus détaillé pour lequel des données statistiques  comme  celles de l’Enquête sur la population active (EPA) sont disponibles. De plus, cela nous permet de créer des outils d’exploration de carrière plus précis et d’analyser la transférabilité des compétences.

Les exemples du tableau 2 ne sont donnés qu’à titre indicatif et visent à mettre en évidence les nombreuses utilisations possibles de O*NET pour extraire des informations sur la composition des compétences de la main-d’œuvre canadienne. Toujours à titre indicatif seulement, le tableau 3 présente plusieurs exemples du type d’informations sur les compétences qui peuvent être déduites au niveau des professions à l’aide des données de l’EPA et de l’Enquête sur les postes vacants et les salaires (EPVS).

Tableau 2 : Exemples de professions O*NET avec correspondance univoque aux professions canadiennes

Code et titre CNP Code et titre O*NET
0112.0 Directeurs/directrices des ressources humaines 11-3121.00 Directeurs/directrices des ressources humaines
0823.0 Gestionnaires en aquaculture 11-9013.03 Gestionnaires en aquaculture
1222.0 Adjoints/adjointes de direction 43-6011.00 Secrétaires de direction et adjoints administratifs/adjointes administratives de direction
1416.0 Commis des services judiciaires 43-4031.01 Commis des services judiciaires
2112.0 Chimistes 19-2031.00 Chimistes
2152.0 Architectes paysagistes 17-1012.00 Architectes paysagistes
2264.0 Inspecteur/inspectrice en construction 47-4011.00 Inspecteur/inspectrice en construction et en bâtiment
3112.0 Omnipraticiens/omnipraticiennes et médecins en médecine familiale 29-1062.00 Médecins en médecine familiale et omnipraticiens/omnipraticiennes
3411.0 Assistants/assistantes dentaires 31-9091.00 Assistants/assistantes dentaires
4112.0 Avocats/avocates (partout au Canada) et notaires (au Québec) 23-1011.00 Avocats/avocates

Avantages et limites de O*NET

L’utilisation des données O*NET pour établir une correspondance entre les compétences et les professions présente plusieurs avantages. D’abord, O*NET fournit des cotes de compétences pour  près de 1 000 professions. Ces informations se sont avérées utiles à de nombreux intervenants pour diverses applications, allant de l’orientation professionnelle à la recherche universitaire, en passant par la prise de décisions politiques éclairées sur les futures problématiques en matière de compétences (Handel, 2016). De plus, ces informations ne se limitent pas aux compétences. En reliant les données O*NET aux professions canadiennes, une foule d’informations supplémentaires sur les carrières deviennent accessibles, comme les intérêts professionnels, les styles de travail et le contexte de travail. Toutes   ces informations aident grandement les chercheurs d’emploi à trouver des carrières qui correspondent à leurs préférences et à leurs valeurs.

Ensuite, O*NET a été conçu et révisé en fonction des indications de plusieurs experts : analystes des professions et des emplois, statisticiens, psychologues du travail et des organisations ainsi que d’autres spécialistes du marché du travail et des ressources humaines (National Research Council, 2010). En conséquence, O*NET représente une initiative de grande envergure fondée sur une solide base théorique et empirique.

Néanmoins, l’utilisation des données O*NET pour obtenir des informations sur les profils professionnels des emplois canadiens comporte d’importantes limites. Évidemment, ces données ne sont pas canadiennes. Elles proviennent de titulaires de postes aux États-Unis et d’analystes des professions œuvrant dans un cadre étatsunien. Bien que certaines professions puissent être qualifiées de « continentales » par nature, et donc que leurs profils de compétences ne risquent pas de varier considérablement d’un pays à l’autre, on ne peut ignorer le fait que O*NET représente le marché du travail des États-Unis.

Tableau 3 : Exemples d’indicateurs de la mise en correspondance préliminaire entre 148 codes CNP à 4 chiffres (sur 500) et les professions O*NET

Exemple d'énoncé Description
Les 10 professions ayant le plus haut taux d’emploi exigent un niveau de compétences en sciences significativement plus bas, avec une moyenne de 0,4 contre 1,4 pour les autres professions. Prendre la cote de niveau de compétence O*NET moyenne pour les professions ayant le plus haut  taux d’emploi et la comparer à la cote moyenne pour l’ensemble des autres professions.
La perception sociale est « très importante » pour 11 % des emplois, mais moins de 1 % des gens travaillent dans des postes exigeant que cette compétence soit utilisée à un niveau « élevé » – 98 % travaillent dans des postes où un niveau « moyen » est suffisant. Calculer la part des travailleurs dans des professions où la compétence est « très importante » et, dans ce sous- ensemble, déterminer combien d’entre eux ont aussi besoin de cette compétence à un niveau « élevé ».
Seuls 8 % des Canadiens travaillent dans des professions qui demandent d’avoir une compréhension de lecture à un niveau « élevé » de complexité. Pourcentage de personnes travaillant dans des professions où le niveau de compétence est « élevé ».
Le nombre de postes vacants pour lesquels les mathématiques sont « très importantes » a augmenté de 48 % entre le troisième trimestre de 2016 et le troisième trimestre de 2019. Calculer le taux de variation du nombre de postes  vacants dans les professions pour lesquelles la compétence est « très importante » entre deux périodes.
Le salaire moyen dans les professions où le niveau  de programmation requis est « moyen » ou « élevé » est de 30 % supérieur à celles où le niveau est « faible » (39,25 $/h contre 30,11 $/h). Calculer le salaire moyen pour les professions où le niveau de programmation requis est « moyen » ou « élevé » et à celles où le niveau est « faible ».

De plus, le processus de mise en correspondance des deux systèmes de classification (c’est-à-dire la CNP canadienne et le SOC étatsunien) crée un risque de perte d’information lorsque des catégories de professions sont regroupées pour permettre une concordance. Ce problème ne se pose pas pour les correspondances univoques, comme le montre l’encadré 2. Toutefois, dans de nombreux cas, des professions multiples des États-Unis correspondent à une seule profession du Canada, et inversement. Pour ces correspondances multivoques, les cotes de compétences O*NET liées aux professions des États-Unis doivent être regroupées dans le SOC ou associées à plusieurs codes CNP, ce qui entraîne une certaine perte d’information. Cette perte peut affecter la précision des conclusions que l’on peut tirer à propos des professions au Canada, en particulier les mesures empiriques des données, comme les cotes d’importance et de niveau des compétences.

O*NET lui-même présente aussi quelques lacunes. Premièrement, la façon dont les cotes de compétences sont conçues peut rendre leur interprétation difficile tant pour les utilisateurs que pour les évaluateurs. Dans certains cas, les ancres comportementales utilisées pour évaluer l’importance et le niveau des compétences contreviennent à l’hypothèse de l’intervalle égal5 et s’appuient sur des exemples extrêmes, ce qui soulève des doutes sur la précision et l’utilité générale.

Deuxièmement, les données de O*NET ne sont pas actuelles. O*NET met à jour les données de façon continue sur un cycle de cinq ans pour les professions définies comme recherchées. Pour les autres professions, toutefois, il n’y a pas de période fixe de mise à jour. De plus, lorsque des mises à jour sont effectuées, les anciennes cotes de niveau et d’importance sont simplement remplacées par les nouvelles cotes. Autrement dit, à un moment ou à un autre, O*NET contient un mélange de nouvelles et de vieilles données (Handel, 2016). Les cotes de compétences représentent également des moyennes, qui ne tiennent pas compte des différences d’importance ou de niveau de compétence qui peuvent exister selon les secteurs d’activité et les régions.

Troisièmement, un examen de la base de données O*NET effectué par le groupe d’experts des National Academies of Science, Engineering, and Medicine a révélé que les compétences ciblées  par l’équipe de développement du prototype O*NET n’étaient pas clairement définies (National Research Council, 2010). Ce manque de précision a créé de la confusion entre les descripteurs du domaine des compétences et les descripteurs d’autres domaines ayant des noms similaires. Par exemple, « expression écrite » est un descripteur du domaine des habiletés, et « rédaction » est un descripteur du domaine des compétences. Les différences entre les deux ne ressortent pas clairement des définitions de chacun, ce qui entraîne une charge cognitive mesurable pour les répondants6.

La voie à suivre

Le présent rapport conjoint a examiné les informations sur les professions que l’on pourrait obtenir en exploitant les données sur les emplois/travailleurs, particulièrement sur les compétences, disponibles dans le système étatsunien O*NET, et a mis en évidence les limites à prendre en compte pour ce faire. En raison de ses solides fondements théoriques et empiriques, de la richesse des informations détaillées disponibles et des ressemblances entre les systèmes économiques du Canada et des États- Unis, O*NET est une source crédible d’où tirer  des données relatives aux compétences et aux professions pour le marché du travail canadien.

En effet, O*NET constitue la source de données la plus viable pour démarrer la mise en correspondance des exigences en matière de compétences avec les emplois au Canada. Le recours à O*NET par d’autres États semblables (p. ex. l’Australie) et par certains utilisateurs d’IMT canadiens (p. ex., les conseils de RH de certains secteurs, les conseillers en orientation professionnelle, etc.) démontre son importance et sa pertinence dans le contexte actuel. En effet, dans le contexte de la COVID-19, le système O*NET a également été utilisé pour obtenir des informations sur les professions qui exigent que le travailleur effectue des tâches professionnelles à proximité physique d’autres personnes.

Toutefois, une analyse plus approfondie sera nécessaire pour déterminer dans quelle mesure l’information provenant de O*NET s’applique au marché du travail canadien et pour décider de la meilleure manière de diffuser les données et les connaissances qu’on en tire. La validation par l’industrie des données sur les professions et les compétences fera partie des prochaines itérations, une fois que la base de référence O*NET aura été établie.

En plus d’avoir présenté des exemples des types d’informations que O*NET pourrait offrir dans  un contexte canadien, nous avons cerné deux considérations majeures à prendre en compte pour exploiter ces données à leur plein potentiel. La première réside dans la qualité et la justesse de la méthode utilisée pour établir une correspondance entre les professions étatsuniennes et canadiennes et dans la perte d’information qui en résulte. Pour résoudre ce problème, Emploi et Développement social Canada (EDSC) et Statistique Canada travaillent ensemble à l’élaboration d’une table de correspondance solide, informative et cohérente entre les deux systèmes de professions. Plus précisément, ils ont créé deux concordances : l’une établit une correspondance entre les professions O*NET-SOC à 8 chiffres et les codes CNP à 5 chiffres, et l’autre le fait entre les professions SOC à 6 chiffres et les codes CNP à 4 chiffres. Ces efforts feront l’objet d’un prochain Rapport de perspectives de l’IMT conjoint publié par EDSC, Statistique Canada et le CIMT.

Ensuite, malgré tous ses avantages, O*NET à lui seul ne peut fournir des données sur toutes les compétences de la Taxonomie des compétences et des capacités d’EDSC. En conséquence, EDSC, Statistique Canada et le CIMT examineront ensemble le moissonnage du web et d’autres outils et méthodes possibles pour obtenir des données sur les compétences provenant des offres d’emploi en ligne. Les résultats de cette analyse seront disponibles par le biais du propre système d’information sur les professions et les compétences du Canada, dont les précisions seront communiquées dans un futur Rapport de perspectives de l’IMT.

Enfin, dans notre évaluation de différentes approches, nous sommes conscients que l’objectif est de fournir de l’information relative aux compétences utile aux intervenants. Dans la poursuite de ces activités, dont les travaux conceptuels en cours sur l’élaboration d’un système d’information sur les professions et les compétences, nous mènerons auprès des intervenants des consultations ciblées afin de déterminer si ces informations sont pertinentes pour un public canadien, et le cas échéant, de quelle manière.

Remerciements

Cette édition de Perspectives de l’IMT a été préparée conjointement par le Conseil de l’information sur le marché du travail, Emploi et Développement social Canada (Direction de l’information sur le marché du travail) et Statistique Canada (Centre de l’information sur le marché du travail). Nous tenons à remercier Ugo Ceppi (Emploi-Québec), Ron Samson et Austin Hracs (Magnet) ainsi que Jacob Loree (Université Ryerson) pour leur rétroaction.

Vos commentaires sont les bienvenus. Nous vous invitons à nous faire part de vos observations et opinions sur le sujet en nous écrivant à info@lmic-cimt.ca.

Références

Handel, M. J. (2016). The O*NET content model: Strengths and limitations. Journal for Labour Market Research, 49(2), 157–176. doi:10.1007/s12651-016-0199-8

National Research Council (2010). A database for a changing economy: Review of the Occupational Information Network (O*NET). Washington, DC: The National Academies Press. doi:10.17226/12814

Fleisher, M. S. et Tsacoumis, S. (2012). O*NET® analyst occupational skill ratings: Procedures update. HumRRO: Human Resources Resource Organization. https://www.onetcenter.org/reports/AOSkills_ProcUpdate.html

Annexe A

Tableau A1 : Profil de compétences O*NET v.24.1 pour les directeurs/directrices de ressources humaines (O*NET-SOC : 11-3121.00; CNP 0112)

Compétence Description Importance Niveau
Écoute active Écouter les autres, ne pas interrompre les personnes lorsqu’elles parlent et poser de bonnes questions 78 57
Parole Parler aux autres 78 57
Gestion de ressources humaines Choisir les meilleurs travailleurs possible pour un travail donné et les superviser 78 64
Compréhension de lecture Lire les textes informatifs traitant du travail 75 59
Jugement et prise de décisions Prendre en considération les points positifs et négatifs de diverses options et choisir la meilleure parmi celles-ci 75 57
Rédaction Écrire divers messages aux collègues et aux clients 72 57
Perception sociale Comprendre les réactions des gens 72 57
Coordination Changer ce qui doit être effectué selon ce que les autres personnes ont fait 72 55
Négociation Rassembler les gens pour régler des conflits 72 57
Résolution de problèmes complexes Remarquer un problème et trouver la meilleure façon de le résoudre 72 54
Pensée critique Réfléchir aux points positifs et négatifs des diverses manières de résoudre un problème 69 59
Apprentissage actif Découvrir comment utiliser de nouvelles idées et de nouveaux outils 69 57
Évaluation de systèmes Évaluer le rendement d’un système et trouver des manières de l’optimiser 69 57
Surveillance Surveiller le travail des employés et de divers groupes pour apporter des améliorations 66 59
Persuasion Discuter avec les gens pour les convaincre de changer leur opinion ou leur comportement 66 57
Analyse de systèmes Comprendre comment un système fonctionne et comment les changements futurs affecteront les résultats 66 52
Gestion du temps Gérer votre temps et celui des autres 66 59
Instruction Montrer aux gens comment faire certaines tâches 60 55
Orientation vers le service Être à la recherche de manières d’aider les gens 60 54
Stratégies d’apprentissage Utiliser les meilleures formations ou les meilleures stratégies d’enseignement pour apprendre de nouvelles choses 56 54
Gestion de ressources financières Prendre des décisions en matière de dépenses et faire un suivi de ces dépenses. 47 52
Mathématiques Utiliser les mathématiques pour résoudre des problèmes 41 43
Gestion de ressources matérielles Gérer l’équipement et le matériel 35 41
Analyse des opérations Comprendre quelles sont les fonctions et l’utilité d’un produit ou d’un service 31 29
Conception technologique Rendre l’équipement et la technologie utiles aux clients 19 13
Programmation Écrire des programmes informatiques 19 20
Surveillance du fonctionnement Surveiller les jauges, les cadrans et les écrans pour s’assurer du bon fonctionnement d’une machine 19 11
Sciences Utiliser des règles ou des méthodes scientifiques pour résoudre des problèmes 16 14
Analyse du contrôle de la qualité Tester l’efficacité d’un produit ou d’un service 16 11
Opération et contrôle Utiliser de l’équipement et des systèmes 6 Non pertinent
Sélection d’équipement Décider quels outils ou quel équipement est nécessaire pour effectuer une tâche 0 Non pertinent
Installation Installer de l’équipement, des machines, du câblage ou des programmes informatiques 0 Non pertinent
Entretien d’équipement Planifier et effectuer l’entretien de base de l’équipement 0 Non pertinent
Dépannage Repérer quelle est la source d’un problème causant une dysfonction de l’équipement, des machines, du câblage ou d’un programme informatique 0 Non pertinent
Réparation Réparer les machines ou les systèmes à l’aide des bons outils 0 Non pertinent

Annexe B

Aux États-Unis, les professions sont structurées selon le système de la Standard Occupational Classification (SOC), dont la 2018 SOC est la plus récente version. Cette structure de classification hiérarchique utilise un code à 6 chiffres pour recenser 867 professions particulières (c’est-à-dire distinctes). Les professions particulières sont ensuite regroupées en trois niveaux supérieurs, identifiés par les deux premiers chiffres (« grand groupe »), les trois premiers chiffres (« groupe secondaire ») et les cinq premiers chiffres (« profession générale ») (voir la figure 3). O*NET développe ces 867 professions SOC à 6 chiffres pour créer 1 016 titres de professions à 8 chiffres, au moyen d’un système de codage appelé la taxonomie O*NET-SOC.

Figure 3 : Système des professions des États-Unis

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Le Canada utilise un système similaire, la Classification nationale des professions (CNP), dont la version  la plus récente est la CNP 2016 version 1.3. Comme la SOC des États-Unis, la CNP canadienne est une classification hiérarchique. La principale différence est que le système canadien est basé sur des codes   à 4 chiffres identifiant 500 professions ou « groupes de base », qui sont ensuite agrégés afin de former trois niveaux supplémentaires, identifiés par le premier chiffre (« grande catégorie »), les deux premiers chiffres (« grand groupe ») et les trois premiers chiffres (« groupe intermédiaire ») (voir la figure 4).

Figure 4 : Système des professions du Canada

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Tout comme le système O*NET développe la SOC avec des chiffres supplémentaires pour identifier des catégories professionnelles plus fines, Emploi et Développement social Canada (EDSC) a étendu la CNP    à 5 chiffres afin de fournir des profils détaillés pour 930 professions. Ni O*NET-SOC 2010 ni la CNP à 5 chiffres ne sont associés à des données statistiques. Statistique Canada ne recueille des données sur les professions qu’au niveau des codes CNP à 4 chiffres (par exemple dans l’Enquête sur la population active, EPA), tout comme le Bureau of Labor Statistics des États-Unis collecte des données sur les professions dans son EPA au niveau du SOC à 6 chiffres.

Notes

  1. L’équipe de développement du prototype était  composée  d’un  groupe  de  firmes  de  conseil  spécialisées dans l’analyse des professions, financées par le ministère du Travail des États-Unis et ayant pour mission de concevoir un « nouveau DOT » au milieu des années 1990 (National Research Council, 2010). Avant la publication effective de la base de données O * NET, des modifications mineures ont été apportées aux descripteurs de compétences originaux.
  2. La version actuelle de O*NET (O*NET 24.1) utilise la classification O*NET-SOC 2010, qui contient un total de 1 110  professions. Les  données sont recueillies pour 974  de  ces  professions (136 existent  uniquement sous forme de titre); toutefois, les données sur les  compétences  existent  pour  968  des  professions  pour  lesquelles  des données sont disponibles. En novembre 2020, la base de données O*NET passera  à  la  taxonomie  O*NET-SOC  2019, qui contient 1 016 professions. Les données sont collectées pour 923 de ces professions, et les 93 professions  restantes existent uniquement sous forme de titre.
  3. Les cotes d’importance sont relevées sur une échelle de 1 à 5, et les cotes de niveau, sur une échelle de 0 à 7. L’équation de standardisation des cotes est S = [(O-B)/(H-B)]*100, où S est la cote standardisée, O est la cote originale, B est la cote la plus basse possible sur l’échelle et H est la cote la plus haute possible sur l’échelle.
  4. Les membres des corps législatifs ont le code 0011 dans la CNP et le code 11-1031.00 dans O*NET. Bien que O*NET contient des informations sur cette profession, les cotes d’importance et de niveau ne sont pas actuellement disponibles.
  5. La différence entre les niveaux 2 et 3, par exemple, n’est pas la même que celle entre les niveaux 3 et 4.
  6. En fait, c’est l’une des raisons pour lesquelles les compétences sont évaluées par des analystes des professions plutôt que par des titulaires de postes, ce qui constitue une autre source de critiques.

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