Conséquences de la COVID-19 sur le chômage des femmes
Entre février et mars 2020, le taux de chômage au Canada est passé de 5,6% à 7,8%. Cette variation était surtout causée par l’augmentation du nombre de mises à pied temporaires dans les secteurs des ventes et des services, de l’éducation, du droit, et des services sociaux, communautaires et gouvernementaux. Puisque les commerces non-essentiels ont été forcés de fermer leurs portes, le chômage lié à ce type de travail (ainsi qu’à de nombreux autres secteurs) a pris beaucoup d’ampleur. Nous en sommes venus à nous demander si les impacts de la COVID-19 sur le marché du travail divergeaient selon les sexes. Plus précisément, nous avons voulu savoir si la situation avait disproportionnellement désavantagé les femmes.
Une façon d’y voir clair est de comparer – par grandes catégories professionnelles – la proportion de femmes au chômage à celle des femmes en situation d’emploi. Imaginons, par exemple, qu’en février, les femmes détenaient 80% des emplois dans le commerce au détail mais qu’en mars, elles comptaient aussi pour 80% des pertes d’emploi dans le secteur. Si c’était le cas, elles seraient extrêmement touchées, mais, au moins, les pertes d’emploi seraient proportionnelles à leur taux d’emploi dans le secteur. Le Tableau 1 adopte cette approche et compare le pourcentage de pertes d’emploi chez les femmes au pourcentage d’emplois occupés par des femmes dans une dizaine de grandes catégories professionnelles au mois de mars.
En mars, sauf pour deux grandes catégories professionnelles, le pourcentage de perte d’emploi chez les femmes était plus élevé que leur taux d’emploi au mois de février. Par exemple, au mois de mars, pour la catégorie de l’éducation, du droit, des services sociaux, communautaires et gouvernementaux, le pourcentage de chômage chez les femmes s’élevait environ à 80% (alors que le pourcentage d’emploi dans ce secteur en février était de moins de 70%). Entre février et mars, alors que le taux de chômage a augmenté de façon spectaculaire, la part de chômage des femmes a augmenté aussi, sauf dans le secteur des arts, de la culture, des loisirs et du sport. En gros, on peut voir que les femmes ont été davantage touchées que les hommes par les mises à pied – en comparaison, en tout cas, avec leur part d’occupation du marché de l’emploi – et ce, dans presque tous les secteurs d’emploi. On peut en conclure que, par catégorie professionnelle, la distribution des mises à pied penche davantage que l’on pourrait penser du côté des femmes.
Tableau 1. Conséquences des résultats de l’Enquête sur la population active (EPA) sur l’emploi des femmes en février et mars 2020 | ||
Pourcentage de pertes d’emploi des femmes Mars 20201 |
Pourcentage d’emploi des femmes Février 20202 |
|
Personnel de gestion | 38,5 | 35,3 |
Travailleurs des affaires, des finances et de l’administration | 69,3 | 68,3 |
Sciences naturelles et appliquées et travail apparenté | 17,8 | 23,2 |
Professionnels de la santé | 89,8 | 79,3 |
Travailleurs de l’éducation et du droit, services sociaux, communautaires et gouvernementaux | 79,1 | 69,8 |
Travailleurs de l’art, de la culture, des sports et loisirs | 54,7 | 54,3 |
Personnel de vente au détail et de service | 56,0 | 54,7 |
Métiers, transporteurs de matériel et d’équipement et travail apparenté | 10,4 | 6,5 |
Ressources naturelles, agriculture et travail de production apparenté | 26,7 | 18,0 |
Production industrielle et services essentiels | 36,2 | 30,4 |
1. Le pourcentage de pertes d’emploi correspond au nombre de femmes au chômage divisé par le nombre total de chômeurs.
2. Le pourcentage d’emploi est le nombre de femmes en situation d’emploi divisé par le nombre total de la population en situation d’emploi.
Source: Calculs du CMIT basés sur l’Enquête sur la population active (EPA), février et mars 2020. Les valeurs ne sont pas désaisonnalisées.
Les discussions à venir sur les conséquences de la COVID-19 sur la situation d’emploi des femmes devront tout à la fois prendre en compte les répercussions particulières aux diverses professions (c’est-à-dire à celles dominées par les femmes, comme l’éducation) mais aussi les secteurs où le chômage touche démesurément les femmes. Nous continuerons, en tentant de mieux comprendre les conséquences de la COVID-19 sur le marché de l’emploi, à suivre de près la situation et à intégrer les nouvelles données qui se présenteront à nous.
En tant qu’économiste du CIMT, Brittany Feor contribue à l’accessibilité et à l’analyse de l’information sur le marché du travail, et offre une expertise en matière de recherche quantitative.
brittany.feor@lmic-cimt.ca