Les conséquences de la COVID-19 sur les femmes travaillant à temps partiel
Les fermetures liées à la COVID-19 ont entraîné des pertes d’emplois massives qui ont frappé certains secteurs plus que d’autres et engendré des bouleversements généralisés. Cependant, les travailleuses ont été tellement affectées que certains économistes parlent d’une première « récession au féminin » ou she-cession. Entre février et mai 2020, les femmes ont subi 57 % des pertes d’emplois et connu des taux de pertes d’emplois plus élevés que les hommes, tous niveaux de scolarité confondus. On sait également que les travailleurs à temps partiel ont été touchés de manière disproportionnée. Si l’on considère ces deux dimensions, les femmes qui travaillent à temps partiel représentent le tiers des pertes d’emplois totales, alors qu’elles ne comptaient que pour 13 % de l’emploi avant la crise.
La figure 1 montre la part des pertes d’emplois au cours des quatre derniers mois pour les femmes et les hommes travaillant à temps plein et à temps partiel par rapport à leur part d’emploi avant la COVID-19. Si les pertes d’emplois étaient proportionnelles, ces deux distributions seraient à peu près les mêmes. Cependant, il est clair que la répartition des pertes d’emplois a été inégale. Les femmes occupant des emplois à temps partiel représentaient 13 % de l’emploi en février, mais comptent depuis pour 33 % de l’ensemble des pertes d’emplois. De même, les hommes travaillant à temps partiel ont été surreprésentés dans les pertes d’emplois, puisqu’ils formaient 7 % de la main-d’œuvre, mais 17 % des pertes d’emplois.
Même parmi les travailleurs à temps plein, le taux de pertes d’emplois est beaucoup plus élevé chez les femmes que chez leurs homologues masculins. Bien que parmi les travailleurs à temps plein, les hommes représentent une part beaucoup plus importante de la main-d’œuvre que les femmes (45 % par rapport à 35 %), leurs parts de pertes d’emplois, soit environ un quart chacune, signifie que les répercussions sont relativement plus importantes chez les femmes (voir la figure 1).
Figure 1 : Les personnes à temps partiel, surtout les femmes, sont surreprésentées parmi les pertes d’emplois liées à la COVID-19
La part de l’emploi avant la crise (février) par rapport à la part des pertes d’emploi (de février à mai 2020)
Source : Enquête sur la population active, Statistique Canada. Calculs du CIMT.
Les pertes d’emplois les plus importantes sont survenues dans les professions à prédominance féminine de la vente et des services
De toutes les catégories professionnelles, les professions de la vente et des services (CNP 6) à prédominance féminine ont été les plus durement touchées sur le plan des pertes d’emploi au cours des derniers mois, particulièrement chez les personnes à faible revenu. Le nombre d’emplois de ce secteur est passé de 1,1 million en février à 630 000 en mai, soit une baisse de 43 %. La figure 2 présente les parts de l’emploi et des pertes d’emplois dans les professions de la vente et des services. La tendance selon laquelle les travailleuses sont plus affectées est encore plus marquée dans ce secteur. Les femmes qui travaillent à temps partiel représentent quatre emplois perdus sur dix (39 %) dans ce secteur, alors qu’elles n’ont occupé que deux emplois sur dix (24 % de la part de l’emploi). Si les hommes à temps partiel sont aussi surreprésentés parmi les pertes d’emplois dans ce secteur, ils ne comptent que pour la moitié des pertes d’emplois de leurs homologues féminines (21 %), alors qu’ils représentaient une part moins importante de l’emploi avant la pandémie (14 %).
Figure 2 : Les femmes à temps partiel sont surreprésentées parmi les pertes d’emplois liées à la COVID-19 dans la catégorie professionnelle la plus affectée
La part de l’emploi avant la crise (février) par rapport à la part des pertes d’emploi (de février à mai 2020) dans les professions de la vente et des services
Source : Enquête sur la population active, Statistique Canada. Calculs du CIMT.
Qu’en est-il de l’avenir?
Les pertes d’emplois, tant pour les femmes que pour les hommes travaillant à temps partiel, ont été beaucoup plus importantes que leur part de l’emploi d’avant la crise. Pour beaucoup, le travail à temps partiel constitue une source de revenus importante et offre une flexibilité bien nécessaire, en particulier pour les personnes ayant des responsabilités familiales telles que la garde des enfants ou le soutien de parents âgés. Alors que les effets de la COVID-19 continuent de se faire ressentir, nous devons tout mettre en œuvre pour mieux comprendre qui est affecté par les pertes d’emplois afin de mieux cibler nos efforts de relance.
Behnoush Amery est économiste principal au CIMT. Ses travaux portent sur l’information sur le marché du travail notamment l’étude de l’avenir du travail, la relation entre l’éducation et les résultats sur le marché du travail, ainsi sur l’estimation des données granulaires sur le travail.
En tant qu’économiste du CIMT, Brittany Feor contribue à l’accessibilité et à l’analyse de l’information sur le marché du travail, et offre une expertise en matière de recherche quantitative.
brittany.feor@lmic-cimt.ca